Paul Mathias
L'Intervenant
Après des études à l'École Normale Supérieure couronnées par l'agrégation de philosophie en 1980 et une thèse de troisième cycle en 1982, Paul Mathias a suivi la voie de l'enseignement secondaire. Nommé professeur en classes préparatoires en 1988, il y restera fidèle jusqu'à ce jour, où il enseigne au Lycée Henri IV, à Paris. En parallèle, de 1990 à 2001, Paul Mathias exerce la fonction de Maître de conférences à l'Institut d’Etudes Politiques de Paris (IEP). Mais il a également choisi, en 1996, de se mettre en disponibilité de ses postes d'enseignement et d'aller vivre à New York pour se consacrer à l'écriture de La Cité Internet, ouvrage paru aux Presses de Sciences-Po en 1997.
Car Paul Mathias a toujours eu le souci de la recherche, de l'écriture, et de la rencontre avec le public. Outre des ouvrages et articles sur Aristote, Plotin, Bodin, Hobbes, Kant, ou Nietzsche, il a ainsi récemment publié Montaigne ou l'usage du monde (Vrin, 2006). Il participe également, depuis 1995, à un groupe de recherche établi à l'École Normale Supérieure qui travaille sur les relations entre « Réseaux, Savoirs, et Territoires » et au sein duquel il a pu organiser des colloques sur les usages de l'Internet (1999), les mesures de l'Internet (2003), ou les écritures traditionnelles et informatiques (2008). Il est également, depuis 2005, membre du Comité scientifique du groupe de travail « Vox Internet » (Maison des Sciences de l'Homme et Agence Nationale de la Recherche (ANR)).
C'est au titre de ses recherches sur les réseaux que Paul Mathias a été admis au rang de « Directeur de programme » au Collège international de philosophie à Paris, où il tient depuis 2005 un séminaire consacré à l'Internet.
Conférences
Le creuset des identités
L'Internet n'est pas seulement lieu d'information, d'échanges, de commerce et de savoirs. D'une manière ou d'une autre, explicitement ou implicitement, nous « existons » sur les réseaux, nous donnons de la réalité à nos passions, nos envies, nos projets, nos désirs aussi ou notre « raison ». Espace d'écriture et d'expressivité, l'Internet est aussi le creuset de notre identité, ou pour être plus juste, de nos identités.
Observons de quoi le principal de l'Internet est fait : pages personnelles, blogs infinis, une myriade d'occasions de « s'exprimer », comme si justement l'expression s'était fait le centre de gravité de nos pratiques « en ligne ». Le paradoxe, c'est que nous ne disons pas exactement ce que nous sommes, mais devenons plutôt ce que nous disons !
De nouveaux territoires
On dit de l'Internet qu'il rapproche les peuples et les communautés. Avec l'essor de l'Internet, un certain effacement des frontières a conditionné de nouvelles « territorialités », qui sont des territorialités sans marque géographique et très étroitement liées à des pratiques d'écriture, de publication, de mutualisation des savoirs. Facebook, Yahoo, DiggIt, voilà les nouvelles provinces de l'Humanité, faites non de la terre et du droit, mais de mots hasardeux et d'instables significations. Faut-il le craindre ? Et si nous assistions, peut-être à notre corps défendant, à la découverte d'un « Nouveau Monde », à une nouvelle « Renaissance », et à des figures nouvellement créatrices de notre Humanité ?
De Montaigne à l'Internet
Singulière filiation que celle qui va de l'auteur des Essais au développement de l'industrie de réseaux et à leur expansion planétaire ! Simple audace ? Nullement. À lui seul, l'Internet est un monde, et très exactement un « Nouveau Monde » parfaitement analogue à celui que découvrait avec stupeur l'Europe du siècle de Montaigne - monde de mots, de croyances, de convictions, de valeurs.
Voyageur infatigable, celui qui allait devenir le Maire de Bordeaux nous instruit de ce qu'est la rencontre de l'Autre. Incontestablement, les réseaux nous exposent aux regards infiniment multiples des autres. Nouvelles barbaries ? Nouveau cannibalisme ?
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